Y’a pas à dire, on vieilli! On était fatigués en arrivant, mais il nous a fallu presque 5 jours pour nous remettre des 23 h d’avion et du jet lag de 7 h. Nous avons enquillé avions sur avions pour arriver à Saumlaki (îles Tanimbar) avec une pause de 48h à Jakarta – dans les embouteillages, les immenses magasins à la recherche d’un chargeur d’ordinateur et les restau de poissons grillés, puis de qq heures à Ambon (toujours aussi pittoresque).
Bref, nous qui pensions arriver bon pied, bon œil à Saumlaki, pleins d’énergie pour découvrir les immenses plages et autres curiosités, nous nous sommes retrouvés cloués dans un hôtel (charmant, étonnant et confortable, certes) à dormir et bouquiner! Il faut dire que tout déplacement autre qu’en 2 roues était difficilement envisageable et, sous la pluie qui a commencé à tomber drue, cela n’était pas vraiment encourageant.
Nous avons repéré au desk de l’hôtel des petites statues en bois comme celles que nous aimons, mais, rien à faire, le patron ne voulait pas en vendre. Pour en trouver il fallait aller dans un village d’artisans situé à 40 kms de là, Tumbur. Manque de chance, le dimanche tout est fermé et le lundi était férié (montée de Mohammed).
C’est un peu penauds que nous nous sommes apprêtés à partir, quand le chauffeur de taxi qui nous conduisait au bateau nous propose de nous montrer « ses maisons ». Un immense terrain où se dressent une dizaine d’habitations de toutes les régions d’Indonésie, pleines de sculptures et de motifs traditionnels. En 10’, et sous la pluie, nous en avons pris pleins les mirettes, regrettant de ne pouvoir rester plus longtemps avec lui alors qu’il commençait juste à partager avec Marco sa passion du bois.
Le temps de faire quelques photos, et hop, nous voilà sur l’Ambaï où nous retrouvons avec plaisir l’équipage, les guides et Jean-Michel en boat-director avec qui nous avions fait quelques trajets mémorables
La météo annonce un avis de tempête, il est décidé que nous filerons au plus vite vers l’Ouest (et tant pis pour les plongées prévues autour de Tanimbar) afin de trouver un temps plus clément. Ca tangue fort…. La soirée et la nuit ont été houleuses … cela a tapé dur …. mais au lendemain matin … surprise : nous étions revenus à notre point de départ : impossible de sortir de la baie, tant la mer était mauvaise, et après 3 heures de navigation dans la nuit et de fortes vagues, le capitaine a pris la (sage) décision de faire demi-tour …
Direction les îles Banda (archipel des Molluques) … Pas d’avion (ou seulement quand le pilote se réveille, et dans ce cas le retour est parait-il assuré!), c’est donc en ferry que nous rejoindrons Banda Neira, un ancien comptoir aux épices que nous avions découvert lors de notre voyage en 2010. Nous avions été séduits et rêvions d’y retourner.
Les ferry indonésiens n’ont pas bonne réputation et nous avions toujours pris le soin de les éviter. Sachant qu’il y aurait énormément de monde, nous sommes arrivés sagement 2 heures avant le départ du bateau comme nous l’avait conseillé l’agence auprès de laquelle nous avons pris nos billets. Au vu du monde qui déjà s’entasse dans ce qui fait office de salle d’attente, nous ne le regrettons pas.
A l’entrée du port, pendant que nous négocions avec notre chauffeur à qui incombait de payer la taxe d’entrée (ce qu’il refusait de faire), un porteur surgit et s’installe d’office dans le taxi. Sans que nous ayons eu le temps de dire ouf, nos sacs sont débarqués et là, il nous réclame une somme astronomique (le prix d’un restau à 2). Impossible de discuter : notre méconnaissance de la langue et surtout notre statut évident de touristes ne nous met pas en position favorable. Résignés et un peu furax nous acceptons finalement le prix, et, affublés de nos énormes sacs de plongée et de nos non moins gros sacs photos, nous ne sommes pas mécontents de trouver un siège pour s’assoir, sinon, nous aurions fait comme beaucoup d’autres … se poser sur le sol.
Des familles entières sont installées, certains dorment, d’autres mangent. Le voyage sera long pour certains. Depuis quand sont-ils là, où vont-ils ? Une chose est sure, c’est que contrairement à nous, ils n’auront pas eu les moyens de se payer un billet 1ère classe.
Quel bruit ! cela grouille de partout. Les vendeurs ambulants circulent parmi les allées encombrées et vendent l’un de la nourriture (sans doute du riz) emballée dans des feuilles de palmier et des boissons plus ou moins fraiches, l’autre des magasines, des toiles plastifiées qui serviront sans doute à s’allonger sur le sol du bateau…. Les enfants courent, jouent, crient et font les stars devant nos appareils photos avec leurs ballons kitch achetés à l’entrée.
Il fait chaud, il fait moite. Rester vigilants sur nos bagages bouclés à double tour avec des rizzlans, nos sacs, nos poches : les pickpockets sont partout et forcément agiles. On range l’appareil photo, on attend, on observe, on répond aux sourires que nous font les enfants …
Avec 4 heures de retard, le bateau arrive enfin : il n’a pas l’air trop pourri. La foule se lève, les porteurs courent, c’est à qui sera le premier pour attraper un des énormes colis qui sera débarqués. Les marchands se précipitent, il y a les voyageurs qui arrivent, il y a ceux qui partent. Combien de personnes voyagent dans ce ferry ?
Sagement, Marco propose de ne surtout pas se précipiter : nous avons un n° de cabine, et cela ne sert à rien d’aller se perdre dans cette cohue où chacun joue des coudes. Mais notre porteur en a décidé autrement. Il attrape nos sacs et se fraye un chemin dans cette fourmilière. Tant bien que mal nous le suivons : ne pas perdre de vue nos sacs ! Plus on approche du bateau, plus la foule se densifie. Je serre la main de Marco : ce genre de situation m’angoisse. Nous donnons nos billets, payons le porteur et commençons l’ascension de la passerelle.
La 1ère vision de l’intérieur du bateau est saisissante : nous traversons des allées de lits superposés déjà occupés. On dirait un dortoir de prison tel qu’on en voit dans certains films américains. 4ème, 3ème classe ? C’est assez glauque et inutile de préciser qu’il n’y a pas l’ombre d’un seul visage occidental à cet étage. Finalement nous arrivons à l’étage des cabines first class… et récupérons la clé de notre cabine.
Là, le porteur se retourne vers Marco et lui réclame son dû. Cela va durer pratiquement ¼ d’heure, de gueulantes, d’insultes…. Nous avons déjà payé, pas question de recommencer. Heureusement qu’un indonésien se mêle de la discussion et demande au porteur de vider ses poches. Il en sort nos deux beaux gros billets … au milieu de petite monnaie. Finalement, nous réglons le problème en nous enfermant dans la cabine jusqu’au départ, laissant le porteur face à une porte close.
Notre cabine ? La notion de 1ère classe n’est pas la même que chez nous : il y a une télévision sans antenne (surprenant tout de même de trouver une télé), les lampes n’ont pas d’ampoule, quant à ce qui sert de salle bain … nous y pénétrerons que pour le strict nécessaire.
Deux heures plus tard, nous mettons le nez dehors pour acheter quelque chose à se mettre sous la dent : nous n’avons pas entendu l’appel pour le diner (mais y en a-t-il eu seulement un ?). Le bateau démarre enfin, laissant tout le monde s’installer pour la nuit. J’aurai voulu prendre quelques photos, mais cela aurait été provocateur, limite indécent. Laissons les mots raconter le film.
Ancienne capitale hollandaise des Moluques, Ambon présente ce côté désuet d’une ville qui a perdu de sa prestance mais où l’émergence d’une nouvelle économie de marché se fait sentir.
Sitôt arrivés, nous nous sommes mis malgré nous, au rythme doux et calme qui semble régner sur la ville, loin de l’agitation que nous avions perçue en 2009 lorsque nous y avions fait escale le temps d’une soirée.
En quelques heures nous maîtrisions la topographie de la ville qui s’est construite autour du port et se développe à flanc du colline et étions dignes de nous déplacer vers les bistrots et restaus cités dans le Lonely Planet , découvrir le marché, le port où nous allions embarquer, faire un peu de shopping pour compléter nos collections de chemises estampillées « Batik Bagus » (bon batik), changer des euros sachant qu’il n’y aurait pas de banque à Banda Neira…
Nous avons été charmés par la gentille des habitants qui semblent recevoir peu de touristes, et avons été accueillis partout avec des sourires. Les gens nous interpellaient pour que nous les prenions en photos, y compris des écoliers qui ont insisté pour poser devant la mosquée.
Pourtant, marcher dans les rues d’Ambon n’est pas sans risque, tant les voitures se bousculent, toutes concentrées dans les mêmes rues alors que de nombreux cyclo-pousse se frayent habilement un chemin au milieu de la circulation.
Nous ne pouvions pas ne pas essayer : une vraie expérience ! Cette ville est kitch, un peu vieillotte … du Plastik Bazar à toutes les échelles : les jouets, la vaisselle, les meubles, l’ameublement en général … rose bonbon ou vert fluo, cela sent la camelote bon marché. Chinois, dirait certains ? Non, Ambon ne sent pas l’argent !
Quittant les axes principaux qui quadrillent le « centre ville » et semblent délimiter de petits quartiers, nous pénétrons dans une ruelle ombragée où jouent des enfants circulant sur des vélos plastiques de toutes les couleurs.
Plus loin nos narines sont mises en éveil par les odeurs de soupe émanant de la charrette d’un vendeur ambulant. Pour trois francs, six sous, on s’offre une pause au coin d’un arbre. C’est simple, c’est bon … le soir même nos estomacs nous feront savoir que ce n’était pas la meilleure idée que nous ayons eue.
Tous les métiers ont pignons sur rue – voire même directement sur le trottoir – artisans, couturier, marchands de meubles, réparation de moteurs ou d’engins en tout genre…
D’anciens métiers comme des vulcanisateurs côtoient des marchands de téléphonie ou de sono, l’émergence de la nouvelle économie de marché se juxtapose ave la tradition tels ces deux hommes qui battent avec des sortes de fléau de la fibre de noix de coco qui sera transformée quelques rues plus loin en copra. Ah les odeurs! Difficile à décrire, difficile à transcrire …
Somnolence, nonchalance … nos narines sont attirées par l’odeur d’un barbecue : c’est un restau où l’on peut manger du poisson grillé accompagné d’un bon dabu-dabu (la sauce pimentée maison). C’est là que nous finirons notre journée. Demain, nous embarquons pour les Banda, une autre histoire nous attend.