Pour compléter les écrits, voici des cartes, quelques commentaires et photos sur « Taka Bonerate » et « Wakatobi », deux archipels dont les noms nous ont fait rêver plusieurs mois avant le départ (voir du rêve …).
Taka Bonerate (littéralement « coraux empilés sur le sable ») est un parc national situé dans le nord-ouest de la mer de Flores. C’est le 3ème atoll du monde après Kwajelein dans les îles Marshall et Suvadiva dans les Maldives.
Nous y avons plongé 3 jours (dont les fameuses plongées sur Kaka Bia) mais c’est surtout la limpidité de l’eau et la taille de la faune accrochée (gorgonne, éponges …) qui nous ont impressionnés.
Par contre, nous avons été étonnés de ne pas trouver des eaux plus poissonneuses, mais on peut espérer que la politique de préservation des espèces mise en place depuis le classement de l’archipel en parc national portera ses fruits à moyen terme.
Sur Wakatobi, 3 jours de plongée, une douzaine de sites : peu de poissons encore, par contre la clarté de l’eau était au rendez-vous!
Nous nous sommes régalés, avons pris quelques photos dont voici un échantillon qui marquera plus que de grands discours.
Là, vous voyez, sur la route d’Ambon, il y a un point sur la carte, O55 39 S, 124 500 E, un minuscule îlot, on peut s’y arrêter et voir comment c’est. Cela vous dit ? ». C’était deux jours avant de quitter l’archipel des Wakatobi ( Wangiwangi,Kaledupa,Tomia, Binonko) et nous savions que nous aurions plus de 2 jours de navigation avant de relier Ambon.
Evidemment, l’idée de jouer les explorateurs nous tente, car toute plongée est forcément une découverte : courant ou non, visibilité ou non, sable ou tombant, poissons ou non, petits ou gros, gorgones, laminaires, éponges ou anémones … il y a toujours une certaine part de surprise. Là, elle sera totale, personne n’ayant aucune information sur cet îlot.
Nous voilà donc sous l’eau et sommes tout de suite approchés par des bancs de thon dents de chiens mesurant près d’un mètre : ils ne nous quitteront pas de toute la plongée. Les platax sont énormes, les bancs de carrangues se succèdent, là un gros napoléon majestueux, là un requin, partout ça grouille, ça frétille dans le bleu. L’eau est limpide, les coraux sont intacts, les éponges scintillent, les gorgones sont géantes… Cela respire la santé. Voilà où se cachent les poissons que nous cherchions aux Wakatobi !
Il y a du courant, nous ne prolongeons pas le spectacle …. celui-ci sera privé, nous n’avions pas pris nos appareils. « On ne traîne pas, il y a de la route à faire ». C’était la pause pipi autorisée par le capitaine.
Après 2 jours ½ de mer, nous voici au large d’Ambon, capitale des Molluques. L’équipage est fatigué, mais content d’avoir mené le Tidak Apa Apa à bon port. Contrairement à Labuan Bajo, Ambon est une vraie grande ville, dont nous apercevons l’étendue depuis le bateau … et de nuit. Les lumières sont denses et s’étalent sur les collines.
Au réveil, une première surprise : ce que nous pensions être le port, se résume à une dizaine de chalutiers colorés.
Nous ne savions pas encore que le « vrai » port était de l’autre côté de la passe.
L’eau est … douteuse … un peu huileuse, des sacs et détritus de toutes sortes dérivent à la surface. Bienvenue dans le monde des humains. Rien de vraiment très engageant…. Allez, on y va, il paraît que nous allons être étonnés. Evidemment, on fait confiance, on n’aura qu’à prendra une bonne douche après la plongée. Et là, effectivement, pour une surprise, c’est une surprise : le site se nomme Twilight zone, la 4ème dimension, et nous voici dans une véritable décharge municipale (moins les odeurs. Hé, hé y’a des avantages à respirer avec un détendeur !) : pneus, bouteilles, sacs à main, portefeuille (vide malheureusement), chaussures, carcasse de voiture, vélo … bref, tout ce qu’on peut trouver dans un port. Bertrand et Nicole ajustent leurs yeux de lynx et, armés de ce qui ressemble fort à un piquet de tente, commencent à gratouiller.
On oublie très vite l’environnement et voici devant nos yeux des poissons feuilles, des poissons démons, des poissons scorpions, des rascasses dindons.
Dans un pneu se nichent 2, 3, 4, 5 …. murènes, murènes œil blanc, murènes léopard (nid d’abeille), murènes à long nez. Là un crabe zébra, ici un crabe orang-outang,
plus loin des dragonnets, des crevettes boxer,
des oursins de feu,
des serpentines, une mini-seiche, une belle pieuvre et une grosse seiche, des poissons pégase, des poissons vaches,
des poissons porcs-épics….
Devant nous passent une cinquantaine de platax, des bancs de poissons rasoirs et un autre très impressionnant de silverslide. Il y en a tellement qu’on a du mal à se voir… on ne se voit plus. Au dernier moment, nous tombons sur un hippocampe :
il est gros, chevelu, marron, mal peigné ….
Mais on le distingue bien. N’en jetez plus, on demande grâce ! La faune à de quoi manger, de quoi se loger. Alors, pourquoi s’en priver !!!
En fin d’après-midi, nous débarquons en ville. Ouh là là : il y a du monde, beaucoup beaucoup de monde, du bruit, des odeurs, des voitures, des embouteillages, des pots d’échappement. La ville quoi !
Nous grimpons dans un pousse-pousse (les taxis du coin), il se fraye sa route avec habilité : les notions de priorité, cela n’existe pas, la notion du plus fort, oui ! Ils font la course, c’est un jeu, le premier arrivé sera payé un peu plus. Bonjour les mollets ! Je serre un peu les dents, ferme les yeux …. Pas eu le temps de prendre des photos, dommage ! L’hôtel « moderne » propose une connexion Wifi, l’ADSL n’est pas arrivé jusqu’ici, c’est sûr. Plane-plane, c’est pas la peine de s’énerver…
Nous attendrons nos beignets de crevettes dans une salle de restau kitch à souhait où une chanteuse tente de nous séduire avec des mélopées vaguement années 70. Cela oscille entre la musique balloche de guinguette et le thé dansant. C’est drôle à mourir.
Retour à nouveau en pousse-pousse au milieu des bars à karaoké et des bordels…. Un port quoi ! On devine le marché de nuit, la foule qui s’y presse … pieds dans la vase pour remonter sur l’annexe (encore une fois, vive les crocks), retour sur le bateau. Demain, lever à 5 h, heu non, 4 h : nous n’avions pas réalisé que nous avions franchi un fuseau horaire. Le concours de chant des muezzins nous aurait de toute façon réveillés, on se serait cru en pleine ligue des improvisations !
Au matin du 2/10, le Tidak Apa Apa lève l’ancre : direction Ambon (îles des Molluques). 13 jours de mer pour arriver à destination et plus de 20 plongées.
Les côtes de Florès s’éloignent, petit à petit les îlots disparaissent et, à part les iles où nous accosteront pour plonger, nous aurons les flots pour seuls voisins … hormis quelques bateaux de pêcheurs rencontrés de-ci et de-là, les oiseaux, les dauphins et des poissons volants. Les téléphones et les connexions internet ne passent plus. Enfin seuls!
Bertrand et Nicole, fondateurs de Komodo Sailing et maîtres des lieux, nous font la présentation du bateau et des membres de l’équipage :
Le Tidak Apa Apa est un « phinisi »,, voilier traditionnel indonésien en bois de fer, fabriqué dans le chantier naval de Tanah Beru, près de Bira dans le sud de Sulawesi . C’est également de là que sont originaires les 3 membres de l’équipage, des hommes de la mer nommés des «orang-laut » : Kariono, le capitaine du bateau, Subandi, le chef cuisinier et Basri, le chef mécanicien.
Le bateau est aménagé avec goût et tout est nickel. Prévu pour 8 personne, l’espace est collectif, mais on est loin des couchettes que l’on trouve parfois sur certains bateaux de croisières : ici 4 lits à baldaquins, des serviettes, sarongs et paréos pour chacun, des sanitaires en commun avec vue sur mer, mazette !
Quant à la cuisine, chapeau au cuisinier qui se met en 4 pour nous concocter de bons petits plats à tous les repas : barracuda grillé, tartares de thon relevé au citron vert, gingembre et citronnelle, bouillabaisse indonésienne (soto madura, sauce bumbu), poulet curry sauce coco (kelaps), poulet frit (tenung bumbu), dorades coryphènes … et autres spécialités du, des chefs (car Bertrand met souvent la main à la pâte). Le nerf de la guerre !
Le temps passe vite, les jours se suivent et ne se ressemblent pas : plongées (3 par jour si on est sur site) et temps de navigation (2jours ½ d’affilée pour relier l’archipel des Wakatobi à Ambon) : dans ce cas, tout l’équipage ainsi que Bertrand et Nicole se relaient à la barre.
Pendant ce temps, nous on bouquine, rêvassons, trions nos photos, admirons les levers/couchers de soleil, regardons la mer … ou mettons à jour quelques textes. Quelle activité!
Fin de journée …. Les couchers de soleil sont sublimes,on se retrouve tous autour de la table à regarder les cartes de navigation,
Et puis, les questions existentielles : «alors, la prochaine plonge, on la fait où ? » « t’as vu quoi ce matin ? et ce truc là, ça s’appelle comment ? » …. On sort les bouquins, comparons nos paramètres, échangeons quelques blagues, finissons de remplir nos carnets de plongée …. et à 21h, comme les poules, pipi, les dents (pas pour les poules), dodo, et au lit. Demain, nous serons debout au lever du soleil, prêts à retourner à l’eau.
Après une nuit de houle où le monde a fort peu dormi, nous mouillons face au village de Waha, au nord de l’île de Tomia (le « TO » de Wakatobi).
La mer est calme, et, après deux « petites » plongées cool , nous décidons de faire un tour en ville.
]Pour l’occasion, une belle chemise, un tee-shirt blanc, un pantalon propre, et, les crocks remisées depuis 1 semaine au fond de la cabine font leur retour à la sur face.
Basri, le chef mécano, sort l’annexe et nous débarquons à terre. Cela ne tangue pas trop ! Mignon comme tout ce petit coin : des petites chèvres dans un enclos, des gamins qui courent partout et qui nous regardent avec des yeux ronds et des billes souriantes.
Des petites maisons colorées sur pilotis (cela permet de gagner de la surface au sol, d’avoir de l’ombre et d’éviter aux petites bêtes de rentrer dans les habitations) …
Il émane de ce lieu un calme étonnant et l’on se croirait dans un conte pour enfants ou dans un décor. D’où vient cette impression ? De la couleur des maisons aux teintes pastel ? de la végétation, du regard des habitants qui vaquent tranquillement à leurs occupations ?Nous ne le savons pas exactement? Nous oserons quelques photos des lieux en prenant garde de ne déranger personne (du moins nous l’espérons).
Très vite, notre présence est repérée : derrière nous, le groupe de gamins grandit, nous les entendons plutôt que les voyons : le son des savates glissant sur le sol s’amplifie au fur et à mesure que nous avançons dans le village. De jeunes ados, les plus hardis, viennent nous voir, prononcent quelques mots d’anglais passe-partout : What’s your name, Hello Mister, need help ? Sourires, remerciements, curiosité mêlée de timidité. Nous lançons des « Selamat Sore » (bon après-midi), aux gens que nous croisons, nous osons faire quelques photos. Plus loin, nous retrouvons Nicole qui, parlant couramment l’indonésien, engage un dialogue plein de rires avec les enfants.
Distribution de bonbons, « salut, comment ça va ? ça va très bien, et toi ? ». Chacun répète consciencieusement ces quelques mots, cela sera utile un autre jour avec de nouveaux étrangers. Faire comprendre que nous venons de France déclenche à chaque fois la même réaction : Zidane !
5/10 – Après 2 jours et 7 plongées sur l’archipel de Taka Bonerate, cap vers l’est pour atteindre un petit point sur la carte : Kaka Bia
Kaka Bia, tel est donc le nom de cet îlot, Bertrand et Nicole n’y ont jamais plongé, ils en ont juste entendu parler « allez-y, cela vaut le coup ». Découverte donc.
Notre arrivée est saluée par des dauphins qui semblent guider le bateau, tandis qu’au-dessus de nous des oiseaux effectuent des vols en piqué.
Il y en a tellement que la cime des arbres est toute blanche. Cela frétille et grouille de toute part : bon signe pour nous ! Pas d’âme qui vive, nous sommes isolés de tout.
Ah non, pas tant que ça, car voici 2 minuscules pirogues de pêcheurs qui semblent surgir de nulle part. Mais d’où viennent-ils donc ?
Pas le temps d’avoir la réponse, nous voici sous l’eau.
Et là, quelle surprise !
Nous voici dans le monde du gigantisme : tout d’abord des gorgones immenses, puis des éponges barriques toutes plus énormes les unes que les autres.
Accrochées à la paroi, ces éponges ont des formes incroyables : manches à air, masques, gramophones, haut-parleurs, bouches hurlantes …. On s’attend à ce que cela parle, crie, s’anime … mais non, seul le bruit de nos bulles est perceptible. Comment appeler cet endroit? » Grammophe Reef « , » La Voix de son Maître « ? …
Plus tard on nous expliquera que la grande quantité de goemond dû aux oiseaux pourrait expliquer le gigantisme de cette faune accrochée (production de nitrates). Cela serait à vérifier.
On se regarde éberlués, la visibilité est excellente, les fonds sont incroyablement intacts, on croise des bancs de thon de fort belle taille, les platax nous accompagnent pendant une bonne partie de la plongée, des tortues mangent tranquillement … nous n’en croyons pas nos yeux … c’est sûr, cette plongée là, restera gravée dans les annales! On se laisse porter, on profite du paysage. Pourquoi s’en priver!
Sur le haut du récif, pas mal de courant :
on se plante en drapeau pendant que défilent sous nos yeux des bancs de thon, d’anthias, de vivaneaux, de chirurgiens et bien d’autres ….Cela grouille!
Notre départ étant retardé d’une journée (le temps que les membres de l’équipage du Tidak Apa Apa rentrent de chez eux où ils ont fêté la fin du Ramadan), nous allons donner nos premiers coups de palme dans le parc de Komodo avec Dive Komodo, un club tenu par Greg, un australien: 2 plongées où nous avons rencontrés plusieurs requins
des coraux sublimes,
une eau cristalline dans laquelle sont amarrées quelques goélettes de croisière, du courant (c’est connu sur Komodo),
de la faune en pagaille,
de la flore en grande quantité … Mais, quelques images seront sans doute plus appropriées que des beaux discours.
Arrêt dans une petite crique, le temps de faire un plongeon pour les uns et un baptême pour les autres (en cadeau, ils ont même eu droit à la visite d’une manta !).
Komodo, c’est comme les bonnes choses, une fois qu’on y a gouté, on a envie d’y revenir ! Nous avons été mis en appétit, alors le verdict est tombé : il faudra que nous y retournions, c’est sûr !
1/10 – Bali, c’est Bali …. L’Indonésie c’est autre chose …
1 heure d’avion depuis Denpassar suffit pour nous propulser dans un autre monde : d’une île à l’autre, nous passons progressivement de la forêt luxuriante à une nature beaucoup plus ingrate, sèche, aride et, d’un prime abord, pauvre.
L’arrivée dans la capitale de Flores (Labuan Bajo) nous fait la même impression
fini les boutiques regorgeant de tissus, de fringues, de fruits et légumes, le côté mercantile et touristique, place aux petites échoppes, le marché aux poissons et ses mouches, l’unique supermarché (où l’on trouve quand même à acheter un téléphone), là une « torréfaction » artisanale, là un étal où se bagarrent en duel quelques fruits ou légume… De nombreux « bémos » (sorte de « cars rapides », pour qui connait l’Afrique) vous emmènent d’un endroit à l’autre de l’artère principale pour 2000 roupies (soit à peine 15 cents !). Ici, le monde n’a que très peu évolué, les souvenirs sensoriels de l’enfance ou de nos voyages de routard remontent à la surface. Autre monde, autre temps.
Nous apercevons quelques clubs de plongée (normal, nous sommes aux portes du parc de Komodo, réputé pour ses spots sous-marins magnifiques et … ses varans), prenons nos quartiers dans LE cyber-café dont nous enverrons quelques nouvelles et aussi prendre connaissance du gros tremblement de terre qui vient de frapper l’île de Sumatra. Nous n’en avions pas entendu parler : l’Indonésie, c’est grand, très grand, les phénomènes telluriques sont fréquents et surtout, nous sommes de l’autre côté de la faille.
Le chant du muezzin retenti, suivi bientôt comme en écho par 1, puis 2, puis 3 autres. Bienvenue en Indonésie, le plus grand pays musulman du monde ! Nous apprendrons par la suite qu’il est obligatoire de déclarer la confession religieuse sur l’acte de naissance à l’état civil, au même titre que le nom ou le sexe. Par défaut, tout nouveau-né sera musulman.
Au port, nous grimpons dans un petit canot, et Bertrand nous conduit directement vers notre « boat sweet home », le « Tidak Apa Apa » (ce qui signifie « ça va, y’a pas de problème …»).
En fait, nous ne serons que 7 à bord pour effectuer cette traversée : Kariono, le capitaine du bateau, Subandi le cuistot, Basri, le chef mécanicien, Nicole et Bertrand (les maîtres des lieux et créateurs de Komodo Sailing) et nous deux. Royal ! (voir Apa Apa).
Les marques sont vite prises et nous nous endormons comme des bébés sur le pont,
sous les étoiles, la lune et les haubans, bercés par le clapotis de la mer.
Au réveil nous aurons droit à notre premier lever de soleil sur « la rade » de Labuan Bajo. Mémorable!